En tee-shirt noir avec sa taille imposante, il jeta le gobelet vide après avoir bu son contenu, du café de Touba. Nous saisîmes la taille au rebond. Fort de notre indignation, nous lui disions :
Ainsi donc, tu jettes ta tasse dans la rue.
-J’y ai bien le droit du fait que je paie ma patente.
-Ah bon, lui disions-nous, à vous le droit de salir et aux autres le devoir de nettoyer.
-Vu qu’ils sont payés pour nettoyer autant ne pas empiéter sur leur job.
Nous ne partagions point son point de vue. Ce qu’il comprit aussitôt, il n’était pas non plus disposé à se raviser ; du moins il donnait l’air de ne point se soucier des histoires de salubrité.
Cet entretien servit de prétexte au vieux Adama Ndiaye qui travaillait à la gare de Petersen. Cette personne du troisième âge était décidé à rectifier le tir, à donner une autre image, du reste, plus belle que celle offerte par son jeune collègue tantôt cité. Ce dernier se sentant à l’étroit avait quitté sa place. Nous le perdrons de vue plus tard ; alors qu’il nous avait promis de nous convaincre sur le bien fondé de son geste aux antipodes du civisme.
Avec ses cheveux poivre sel, il prenait le contrepied de celui-ci. Pour lui, les verres à jeter une fois utilisés devraient être mis à la poubelle. Toutefois, tient-il à souligner qu’il serait inconfortable de marcher pendant longtemps sans trouver de poubelle. Vous savez, Monsieur, dans cette gare on avait instauré des poubelles mais les gens avaient au fur et à mesure perdu le réflexe.
C’est certes beau de parler de salubrité mais nous aimerions qu’il y ait plus de possibilités avec des corbeilles tous les 50 mètres.
Aux arrêts des bus Dakar Dem Dikk, des pots étaient placés pour contenir les sachets et autres pots vides néanmoins nous en voyons de moins en moins.
Visiblement très inspiré, M. Ndiaye nous donna sa lecture de la situation actuelle du pays. Notre principal problème réside dans notre manque de sérieux. Pour lui, le respect de soi doit prévaloir. Il concluait par ces termes :
-Tu fais et l’autre défait. Nous n’irons nulle part.
Moustapha, un jeune vingtenaire, vendeur de café, de fortune (car assurant l’intérim de son frère empêché) rejoignit M. Ndiaye. Pour lui, on ne peut pas marcher avec des ordures : on te prendrait pour un fou.
Moustapha voulut se montrer exemplaire. Se définissant comme marchand ambulant, il nous disait gardait les sachets vides de ses bonbons dans sa poche.
Alors que chacun s’y mette. Ces travailleurs de la gare routière ont essayé de démontrer qu’ils ne seraient pas laissés en rade dans la perspective d’un Sénégal réellement propre.
Sénégal : sunumbir