Séjour dans la partie méridionale du Sénégal. Zig… et la «… zik ».
Zig…
Après plusieurs escales, nous nous installâmes, grâce à un concours de circonstances assez particulières, au quartier Escale, en centre ville, à quelques encablures de la SUNEOR et du port maritime de Ziguinchor. Cette partie de la verte Casamance est très animée le jour, du fait des différents services qui s’y concentrent ; et très calme la nuit. Seul couac : la municipalité n’assure pas l’éclairage public, du moins dans les quartiers que nous avions l’habitude de fréquenter : nous nous servions de nos torches pour nous tirer d’affaire.
Ziguinchor, la région dont on nous avait tant vanté les richesses, nous était, à présent accessible. Tel un touriste de fortune, selon certaines mauvaises langues, qui ne nous rataient pas, à chaque fois que l’occasion se présentait ; nous n’avions pas manqué d’immortaliser certaines images qui ne nous étaient pas familières. A l’aide de notre appareil numérique, nous pouvions, à jamais fixer, la végétation luxuriante de cette zone méridionale du Sénégal, tant redoutée du fait des rebelles. Fait étrange : nous oubliions même qu’il y avait une instabilité. Les seuls instants où nous en avions souvenance coïncidaient avec le passage des pick-up des forces armées avec à l’arrière des militaires armés jusqu’aux dents.
Pluies quotidiennes et imprévisibles :
Autre lieu, autres réalités. En effet, si ailleurs il parait raisonnable d’attendre la cessation de toute pluie pour mener ses activités, à Ziguinchor la réalité est tout autre : tout se passe sous la pluie. C’est même devenu une scène ordinaire. Ainsi, pendant la dizaine de jours qu’aura duré notre séjour, nous avions pu nous habituer à la pluie qui, désormais ne nous empêchait plus de vaquer à nos occupations. Le soleil, s’il n’était pas absent durant toute une journée, ne nous offrait que quelques éclaircies. Conséquemment les parapluies et autres matériels (toiles chaussures en plastiques pour se prémunir des dégâts qui proviendraient de la pluie) s’y vendaient comme de petits pains. Cette forte pluviométrie explique, en partie, la présence des reptiles tels que des serpents principalement des couleuvres, des varans etc.
Zig. et ses routes :
Venons-en à la circulation dans cette capitale régionale du sud. Avant cela permettez-nous de déplorer l’état cahoteux des routes qui serait dû aux pluies incessantes. Le prix du taxi est abordable : cinq cents francs quelle que soit la destination. Elle peut toutefois varier. Les cars urbains ne coûtent pas chers non plus : cent francs seulement. Attention à de fausses impressions car ils peuvent te faire faire le tour alors qu’en réalité certaines distances dans leur axe ne sont pas si éloignées.
Les motocyclettes et vélos communément appelés, suivant une synecdoque permettant de désigner la partie par le tout : « deux roues », font partie du décor sur les routes. Il est ordinaire de voir des femmes en tenue traditionnelle ou moderne conduire tranquillement leur moto. Elles n’ont rien à envier, sur ce plan, aux Bamakoises ou aux Ouagalaises.
A côté de ces types de transports, existent les tricycles qui excellent dans l’acheminement des bagages d’un point à un autre ; et les charrettes tirées par des ânes. Soulignons cette particularité : nous n’avons pu y apercevoir ne serait-ce qu’un cheval.
Zig. et la zik :
A Ziguinchor, les gens sont férus de musique. Les cars ou taxis à l’intérieur desquels il n’y a pas de magnétoscope distillant de bonnes sonorités, de toutes sortes, se comptent sur le bout des doigts. Même dans les rues, on peut se permettre facilement une séance d’animation avec le son mis à fond.
Ce goût prononcé de la musique s’expliquerait par le caractère qui fait que Ziguinchor soit une zone regroupant des ressortissants Guinéens de Bissau, de Conakry et des Gambiens.
Zig… et ses bars :
Les bars y sont nombreux, c’est à voir s’il n’y en a pas, par endroits, plusieurs au sein d’un même quartier. Aucune étude fiable n’aura été menée durant notre séjour mais une chose est sûre l’alcool y coule à flot. Il n’y est pas cher surtout la spécialité locale : le fameux « soum-soum » pourrait se vendre selon certaines indiscrétions à raison de deux mille francs les vingt litres.
Zig… et les religions en présence :
Le dialogue islamo-chrétien y est une réalité. Ces deux communautés vivent en parfaite harmonie. Il suffit d’attendre les heures de grande affluence, notamment la fin de messes ou de grande prière du vendredi, pour s’en rendre compte. A titre illustratif, nous évoquons cette anecdote : lors du dernier vendredi de notre séjour, juste avant la prière une jeune chrétienne avait émis le souhait de se convertir à l’islam. Comme d’habitude c’est l’imam qui se charge de cette mission. Pour cela, il récite en premier la formule consacrée avant de demander à la nouvelle venue de la réciter après lui. Fait notoire, on avait comme l’impression que c’est la fille qui était à la place de l’imam, eu égard à sa maitrise parfaite de ce qu’il fallait dire pour embrasser la religion musulmane. L’imam n’avait pas manqué de souligner qu’il ne s’agissait, dans ce cas précis, que d’une simple formalité. Juste pour dire que les frontières entre ces deux principales religions sont poreuses à tel point que tout le monde dit sans arrière-pensées « Yalla baxna : Allah est grand», « Alhamdoulilah »...
Sur la route de Cap- Skiring :
Le paysage fut impressionnant. La verdure s’étendait à perte de vue à perte de vue. Tout au long de la route menant au célèbre site touristique de Cap Skiring, nous tombâmes sous le charme des plantations de rizières, des dattiers, des palmeraies, des rôneraies avec des rôniers aux formes de sirènes, des bananeraies ; ainsi que d’arbres fruitiers de toutes sortes : papayer, manguier…
Au bout d’une heure de route, nous nous trouvâmes sur place. L’occasion qui nous fut donnée de nous entretenir avec quelques « proprios » de complexes hôteliers, nous aura permis de comprendre que la saison touristique allait d’Octobre en Avril de chaque année. Par conséquent, en Septembre les lieux étaient presque déserts n’eût été la rencontre faite avec des guides. Nous visitâmes des villas « pieds dans l’eau » qui constituent le trésor de cette localité. Le sable fin en bordure de plage nous intimait l’ordre d’y marcher pieds nus et d’admirer la beauté des petits cocotiers plantés de manière artistique, en rangées innombrables.
A moins de cinq minutes de ce luxe ambiant, se situe le village des pêcheurs : un paradoxe assez saisissant mais auquel les habitants ont fini par s’habituer. Nous vîmes des pêcheurs artisanaux qui débarquaient avec à bord de leurs pirogues des mâchoirons ou « kong en ouolof » et des escargots de mer affectueusement appelé dans ladite langue nationale « yeet ». Ceux-ci sont majestueusement préparés en vue de leur exportation vers des pays asiatiques. L’islam y est très bien implanté. Nous avons assisté à une séance de récital de coran après la prière de la mi-journée.
Trois « Korité » célébrées dont l’une en pleine mer :
Au bout de treize jours de déplacement, nous décidâmes de rentrer à Dakar par la mer. Nous prîmes, ainsi, le bateau Aliin Sitoe Diatta, le Dimanche 19 Août 2012 à 15, jour de fête pour quelques musulmans Sénégalais. Au moment d’embarquer, une petite indiscrétion nous aura permis d’assister à une discussion entre deux passagers, des quinquagénaires en partance pour la capitale qui se plaignaient de cette particularité sénégalaise aux parfums religieux. En réalité, la fête de l’AÏD EL FITR ou Korité fut célébrée durant trois jours, au gré des sensibilités confrériques : Samedi 17 pour les premiers ; Dimanche 18 pour les deuxièmes et enfin Lundi 19 pour les derniers. Si au quartier Escale où nous résidions le boutiquier du coin, sur un ton sarcastique, nous disait, à quelques heures de notre embarcation qu’il voulait juste savoir le type de lune qu’auraient aperçu ceux qui avait décidé de mettre fin à leur ramadan le samedi ; les deux passagers ci-dessus présentés se disaient tranquillement :
- Tu vois, il y en a qui ont passé la fête hier, d’autres la célèbrent aujourd’hui et les derniers la fêteront officiellement lundi. Et le mardi, ils ne travailleront pas, prétextant les festivités liées à l’événement.
- Ne t’en fais pas mon cher. C’est ce qui arrive quand on est majoritaire : on dicte sa loi aux autres.
A quinze heures nous quittâmes le port de Ziguinchor. Après quelques minutes de bateau, nous aperçûmes des dauphins qui, en véritables maîtres des lieux, nous raccompagnaient nous souhaitant, du coup, un bon voyage. En photographe amateur nous avions voulu, en vain, immortaliser ces instants magnifiques ; contrairement aux touristes Espagnols qui, s’y étant très tôt préparés avaient atteint leur objectif.
De loin en loin, nous nous contentions de quitter cette verte région. Après quinze heures de bateau nous débarquâmes au Port International de Dakar la noire, avec son animation et sa pollution. Et le surlendemain, nous nous rendîmes dans la partie septentrionale du pays, sur notre « Ndar « natal : à Saint-Louis la bleue.
M. Diallo Ibnou
Professeur de Lettres et Blogueur
Doctorant ès Lettres
ibndiallo@gmail.com
Blog : ibnoze.seneweb.com
par Ibnou Diallo, samedi 3 novembre 2012, 15:55 ·