Texte choisi : « Aux feuillantines » de Victor Hugo
I-Présentation de l’auteur et du texte :
Victor Hugo « domine le XIXe siècle par la durée de sa vie et de sa carrière, par la fécondité de son génie et la diversité de son œuvre : poésie lyrique, satirique, épique, drame en vers et en prose, roman, etc. Il a évolué avec son temps, dans son art et dans ses idées, se faisant sinon le guide du moins l’interprète éloquent des mouvements d’opinion. »
Le recueil poétique des Contemplations (1856) est bâti autour de deux tomes : « Autrefois », « Aujourd’hui ». La mort de Léopoldine les sépare. Chaque partie comprend trois livres : « Autrefois » : Livre premier Aurore, livre deuxième L’âme en fleur, livre troisième Les luttes et les rêves
« Aujourd’hui » : livre quatrième Pauca meae, livre cinquième En marche, livre sixième Au bord de l’infini.
« Aux feuillantines » est extrait du livre cinquième intitulé En marche.
II- Texte :
Aux feuillantines
Mes deux frères et moi, nous étions tout enfants.
Notre mère disait: jouez, mais je défends
Qu'on marche dans les fleurs et qu'on monte aux échelles.
Abel était l'aîné, j'étais le plus petit.
Nous mangions notre pain de si bon appétit,
Que les femmes riaient quand nous passions près d'elles.
Nous montions pour jouer au grenier du couvent.
Et là, tout en jouant, nous regardions souvent
Sur le haut d'une armoire un livre inaccessible.
Nous grimpâmes un jour jusqu'à ce livre noir ;
Je ne sais pas comment nous fîmes pour l'avoir,
Mais je me souviens bien que c'était une Bible.
Ce vieux livre sentait une odeur d'encensoir.
Nous allâmes ravis dans un coin nous asseoir.
Des estampes partout ! quel bonheur ! quel délire!
Nous l'ouvrîmes alors tout grand sur nos genoux,
Et dès le premier mot il nous parut si doux
Qu'oubliant de jouer, nous nous mîmes à lire.
Nous lûmes tous les trois ainsi, tout le matin,
Joseph, Ruth et Booz, le bon Samaritain,
Et, toujours plus charmés, le soir nous le relûmes.
Tels des enfants, s'ils ont pris un oiseau des cieux,
S'appellent en riant et s'étonnent, joyeux,
De sentir dans leur main la douceur de ses plumes.
Victor Hugo, Les Contemplations, En marche, 1856
III- Quelques axes de lecture
- Le jardin des feuillantines renvoie à un couvent désaffecté
- L'insouciance des trois enfants Hugo : Abel, Eugéne et Victor
- La transgression de l’interdit
- Relevez les différentes appellations données à la Bible
- Les valeurs des temps verbaux
- Repérez les verbes d'action
- Repérage de champs lexicaux : la religion, la jeunesse, etc.
IV- Insistons sur :
1- La versification
- Composition : huit tercets
Les deux premiers vers de chaque tercet riment ensemble ; les troisièmes vers des deux strophes qui se suivent riment ensemble.
Exemple :
« Mes deux frères et moi, nous étions tout enfants. A
Notre mère disait: jouez, mais je défends A
Qu'on marche dans les fleurs et qu'on monte aux échelles. B
Abel était l'aîné, j'étais le plus petit. C
Nous mangions notre pain de si bon appétit, C
Que les femmes riaient quand nous passions près d'elles. B
- Le mètre utilisé : l’alexandrin
Exemple :
" Mes deux frères et moi, nous étions tout enfants
Tels des enfants, s'ils ont pris un oiseau des cieux,"
- Alternance entre rimes masculine et féminine
Exemple :
« Ce vieux livre sentait une odeur d'encensoir. M
Nous allâmes ravis dans un coin nous asseoir. M
Des estampes partout ! quel bonheur ! quel délire! » F
2- Conjugaison :
L’impératif présent :
L’impératif est employé pour exprimer un ordre, un souhait, un conseil, etc.
Exemple : « Notre mère disait : jouez … »
- Le gérondif :
Le gérondif renvoie à la locution formée par la préposition « en » et le participe présent
Exemple : « S'appellent en riant …
30/04/2017