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" En avant, marssssse !"

Une vie de boy de Ferdinand Oyono

Un dimanche, un texte vous tient toujours en haleine
Texte choisi : " En avant, marssssse ! " extrait d'Une vie de boy de Ferdinand Oyono
I - Présentation de l'auteur : En 1956, l'écrivain camerounais Ferdinand Oyono ( 1929-2010) publia son roman Une vie de boy. Il a publié deux autres romans Le vieux Négre et la médaille (1956) et Chemin d'Europe en 1960. 
II- Texte :
Nous arrivions à destination. Le commandant ralentissait. Penché à la portière, il semblait émerveillé par cette propriétaire qu'on n'espèrait pas rencontrer à plus de soixante kilomètres en brousse. Plus d'excavations, plus d'herbe ; les tas d'immondices des rigoles avaient disparu. Tout avait été nettoyé. Cette propreté était trop nette pour ne pas être récente !
Au loin, un tam-tam retentit. Une rumeur sourde nous parvint. Il était indéniable qu'une grande manifestation nous attendait. Le village fut enfin en vue. Il y régnait un remue-ménage qui ne devait pas être coutumier. Une mer humaine avait envahi la place du village. Les cris stridents des femmes retentirent. Elles criaient la main contre la bouche. On aurait cru entendre la sirène de la scierie américaine de Dangan. La foule se fendit pour laisser passer la voiture, qui s'immobilisa devant un parasolier fraîchement élagué, au sommet duquel flottait un drapeau.
Un vieillard au dos arrondi et au visage aussi ridé qu'un derrière de tortue ouvrit la portière. Le commandant lui serra la main. L'ingénieur lui tendit aussitôt la sienne. Les femmes se remirent à crier de plus belle. Un gaillard coiffé d'une chéchia rouge cria : " Silence ! " Bien qu'il fût torse nu et portât un pagne, son autorité venu de sa chéchia de garde du chef.
Le chef portait un dolman kaki, sur les manches duquel on avait dû coudre à la hâte ses écussons rouges barrés de galons argentés. Un bout de fil blanc pendait à chaque manche. Un homme entre deux âges qui portait une veste de pyjama par-dessus son pagne cria : " Fisk !" Une trentaine de marmots, que je n'avais pas distingués jusque là, s'immobilisérent au garde-à-vous.
" En avant, marssssse ! " commanda l'homme.
Les élèves s'avancèrent devant le commandant. Le moniteur cria encore : " Fisk !" Les enfants semblaient complètement affolés. Ils se serraient comme des poussins apercevant l'ombre d'un charognard. Le moniteur donna le ton, puis battit la mesure. Les élèves chantèrent d'une seule traite dans une langue qui n'était ni le français ni la leur. C'était un étrange baragouin que les villageois prenaient pour du français, et les Français pour la langue indigène. Tous applaudirent.
Ferdinand Oyono, Une vie de boy, Julliard, 1956.
III- Quelques axes de lecture
- L'arrivée du commandant
- Un accueil exceptionnel
- Qu'est-ce qui renvoie à la caricature ?
- Une parade militaire cocasse
- Repérage et interprétation de figures de style : comparaison, parallélisme, hyperbole, gradation, etc.
- Les valeurs des modes et temps verbaux. Mettre l'accent sur les temps du passé : l'imparfait de l'indicatif et le passé simple.
IV- Insistons sur :
1-Les registres de langue[1]

Il en existe 3 qui sont employés en fonction des situations :

1-      Le registre courant : On l’utilise dans une situation ordinaire pour transmettre un message de la vie courante.

On emploie des mots courants, ni familiers, ni recherchés. La construction de la phrase est correcte, sans recherche d’effet de style.

2-      Le registre familier : On l’utilise dans une relation de familiarité sans faire d’effort pour s’exprimer correctement. Le registre familier n’est pas un registre vulgaire même s’il peut le devenir.
Exemple : " C'était un étrange baragouin que les villageois prenaient pour du français,..."
3-      Le registre soutenu : On l’utilise chaque fois qu’on veut marquer un écart avec une langue courante, soit parce que les circonstances l’imposent (discours officiel), soit parce que l’on veut se distinguer.

 2-  La formation des mots
La préfixation : on ajoute un préfixe devant le radical du mot.
La suffixation : on ajoute un suffixe à partir d'un nom, d'un adjectif ou d'un verbe.
Exemple :  " Il était indéniable qu'une grande manifestation nous attendait."
 

[1] S Leroy, G Baille, L Rabier, Grammaire et Expression, 4e/3e Technologiques, NATHAN, France, 1993.

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